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Ni vu ni connu
Je suis le parfum
Vivant et défunt
Dans le vent venu !
Paul Valéry. Le sylphe. In. Georges Pompidou. Anthologie de la poésie française
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Adieu tristesse
Bonjour tristesse
Tu es inscrite dans les lignes du plafond
Tu es inscrite dans les yeux que j'aime
Tu n'es pas tout à fait la misère
Car les lèvres les plus pauvres te dénoncent
Par un sourire
Eluard. A peine défigurée
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Je vous le dis vous le crie vous le chante
Un rire court sous la neige mortelle
Un rire l'aube et la joie d'être au monde
Les fleurs ont les fruits pour miroir
Eluard. Je suis la bête
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Mille soleils mille fourrures
Mille caresses sous le froid
Plutôt que de mourir j'efface
Ce que j'ai mis de temps à vivre
Tous les remous d'un sang rebelle.
Eluard. Je suis la bête
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Sur mes cahiers d'écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable sur la neige
J'écris ton nom
Eluard. Liberté
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Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J'écris ton nom
Eluard. Liberté
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Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
J'écris ton nom
Eluard. Liberté
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Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genêts
Sur l'écho de mon enfance
J'écris ton nom
Eluard. Liberté
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Sur les merveilles des nuits
Sur le pain blanc des journées
Sur les saisons fiancées
J'écris ton nom
Eluard. Liberté
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Sur tous mes chiffons d'azur
Sur l'étang soleil moisi
Sur le lac lune vivante
J'écris ton nom
Eluard. Liberté
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Sur les champs sur l'horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J'écris ton nom
Eluard. Liberté
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Sur les champs sur l'horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J'écris ton nom
Eluard. Liberté
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Sur chaque bouffée d'aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
J'écris ton nom
Eluard. Liberté
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Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l'orage
Sur la pluie épaisse et fade
J'écris ton nom
Eluard. Liberté
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Sur la vitre des surprises
Sur les lèvres attentives
Bien au-dessus du silence
J'écris ton nom
Eluard. Liberté
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Sur mes refuges détruits
Sur mes phares écroulés
Sur les murs de mon ennui
J'écris ton nom
Eluard. Liberté
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Sur l'absence sans désirs
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
J'écris ton nom
Eluard. Liberté
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Et par le pouvoir d'un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer
Liberté.
Eluard. Liberté
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Comprenne qui voudra
Moi mon remords ce fut
La malheureuse qui resta
Sur le pavé
La victime raisonnable
A la robe déchirée
Au regard d'enfant perdue
Découronnée défigurée
Celle qui ressemble aux morts
Qui sont morts pour être aimés
Une fille faite pour un bouquet
Et couverte
Du noir crachat des ténèbres
Eluard. Comprenne qui voudra
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J'aurai pu rire, ivre de mon caprice.
L'aurore en moi pouvait creuser son nid
Et rayonner, subtile et protectrice,
Sur mes semblables qui auraient fleuri.
N'ayez pitié, si vous avez choisi
D'être bornés et d'être sans justice :
Un jour viendra où je serai parmi
Les constructeurs d'un vivant édifice,
La foule immense où l'homme est un ami.
Eluard. La puissance de l'espoir
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Autant parler pour avouer mon sort :
Je n'ai rien mien, on m'a dépossédé
Et les chemins où je finirai mort
Je les parcours en esclave courbé;
Seule ma peine est ma propriété :
Larmes, sueurs et le plus dur effort.
Eluard. La puissance de l'espoir
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Faut-il que pour nous brûlent tant d'étoiles
Et que tant de pluie arrive du ciel,
Et que tant de jours sèchent au soleil
Quand un peu de vent éteint notre voix,
Nous couchant le long de nos os dociles ?
Jules Supervielle. Descente de géants
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Saisir, saisir le soir, la pomme et la statue,
Saisir l'ombre et le mur et le bout de la rue.
Saisir le pied, le coup de la femme couchée
Et puis ouvrir les mains. Combien d'oiseaux lâchés
Combien d'oiseaux perdus qui deviennent la rue,
L'ombre, le mur, le soir, la pomme et la statue !
Jules Supervielle. Saisir
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L'amour s'en va comme cette eau courante
L'amour s'en va
Comme la vie est lente
Et comme l'espérance est violente
Guillaume Apollinaire. Le pont Mirabeau
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Les mains dans les mains restons face à face
Tandis que sous
Le pont de nos bras passe
Des éternels regards l'onde si lasse
Guillaume Apollinaire. Le pont Mirabeau
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Mon beau navire ô ma mémoire
Avons-nous assez navigué
Dans une onde mauvaise à boire
Avons-nous assez divagué
De la belle aube au triste soir
Guillaume Apollinaire. La chanson du mal-aimé
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Que sont mes amis devenus ?
Je crois le vent les m'a ôtés.
L'amour est morte
Ce sont amis que vent emporte
Et il ventait devant ma porte;
Les emporta
Rutebeuf
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J'ai grand désir
D'avoir plaisir
D'amour mondaine :
Mais c'est grand peine,
Car chaque loyal amoureux
Au temps présent est malheureux
Clément Marot
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