jeudi 27 septembre 2012

Anthologie de la poésie française - Pompidou - 2

Je ne vois ami n'amie

Ni personne qui bien die;

Toute liesse défaut,

Tous cœurs ont pris par assaut

Tristesse et mélancolie.

 

Eustache Deschamps Virelai sur la tristesse du temps présent

 

Frères humains qui après nous vivez,

N'ayez le cœur contre nous endurcis,

Car, si pitié de nous pauvres avez,

Dieu en aura plus tôt de vous mercis.

 

L'épitaphe Villon

 

-

Quant à la chair que trop avons nourrie,

Elle est piéça dévorée et pourrie,

Et nous, les os, devenons cendre et poudre

De notre mal personne ne s'en rie;

Mais priez Dieu que tous nous veuille absoude !

 

L'épitaphe Villon

 

La pluie nous a débués et lavés,

Et le soleil desséchés et noircis;

Pies, corbeaux, nous ont les yeux cavés,

Et arraché la barbe et les sourcils.

Jamais nul temps nous ne sommes assis;

Puis ça, puis là, comme le vent varie,

A son plaisir sans cesse nous charrie,

Plus becquetés d'oiseaux que dès à coudre.

Ne soyez donc de notre confrérie;

Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !

 

L'épitaphe Villon

 

Volontiers en ce mois ici

La terre mue et renouvelle.

Maints amoureux en font ainsi,

Sujets à faire amour nouvelle

Par légèreté de cervelle,

Ou pour être ailleurs plus contents;

Ma façon d'aimer n'est pas telle,

Mes amours durent en tout temps.

 

Clément Marot. Chant de Mai et de Vertu

 

Plus ne suis ce que j'ai été,

Et ne le saurais jamais être.

Mon beau printemps et mon été

Ont fait le saut par la fenêtre.

 

Clément Marot. De soi-même

 

Amour, tu as été mon maître,

Je t'ai servi sur tous les Dieux.

Ah si je pouvais deux fois naître,

Comme je te servirais mieux !

 

Clément Marot. De soi-même

 

Qui prêtera la parole

A la douleur qui m'affole ?

Qui donnera les accents

A la plainte qui me guide

Et qui lâchera la bride

A la fureur que je sens ?

 

Du Bellay. La complainte du désespéré

 

-

Heureuse la créature

Qui a fait sa sépulture

Dans le ventre maternelle !

Heureux celui dont la vie

En sortant s'est vue ravie

Par un sommeil éternel !...

 

Joachim Du Bellay. La complainte du désespéré

 

Maudite donc la lumière

Qui m'éclaira la première,

Puisque le ciel rigoureux

Assujettit ma naissance

A l'indomptable puissance

D'un astre si malheureux...

 

Joachim Du Bellay. La complainte du désespéré

 

 

https://www.facebook.com/photo.php?fbid=4490659021855&set=a.2227930575058...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire