dimanche 30 septembre 2012

Un silence assourdissant

Dans une vie simple, l’amour des parents, d’abord pour eux-mêmes, augmente ou diminue, même la répartition routinière des tâches peut en témoigner. Dans la sienne, il ne comprendra jamais pourquoi, lui, il devait apprendre, de son père, se servant de sa mère comme support, la férocité, le déferlement noir d’une haine de soi se mirant au miroir de sa moitié vomie !

Ce qui l’embête, c’est que son père est parti très tôt, il a eu le cancer qu’il méritait. Ce qui l’étonne, le silence qui entoure ses souvenirs, d’abord personne autour de lui n’en parle, et puis dans ceux de sa mémoire, aussi rares soient-ils, il voit son père se déchaînant contre le corps de sa mère, plus petit et plus malléable, la traînant à terre par le cheveux ( c est très primitif, mais son père n avait pas trop d imagination, pas plus que ses ancêtres des cavernes ), des coups qui pleuvent des mains et des pieds partout ! Il les voit bien crier, l un de colère, l autre de douleur, mais il ne peut rien entendre ! Les souvenirs ne sont pas seuls à être silencieux, il se voit debout dans un coin, assister, tout en silence, au spectacle de la rage paternelle éclatante s’il en était pas la cible. Il ne disait rien, ne savait quoi faire ni où aller, hébété, enfermé dans sa prison aphasique.

Ce corps étendu par terre, tiré par les cheveux, tombé et relevé, c’était le corps de sa mère. Son père ivre-mort, se donnait à son sadisme régulier. Après plusieurs brefs mariages, il a trouvé la victime parfaite. Celle qui attendra que la rage s’épuise, où que des voisins interviennent pour la calmer, sinon, elle s’enfuira rapidement par la porte, son enfant sur les bras, et ira réveiller une amie qui habite pas trop loin de l’enfer conjugal.

L’amie qui habite une très petite maison, l’hébergera pour la nuit. Toujours silencieux, il assistera, n’y pouvant rien faire d’autre, aux remontrances et consolations, qui le concernaient pas ! Le matin, la mère se rendra à son domicile, «  je n’ai personne d’autre qui peut me prendre avec mon enfant », donc, son père, vaquera à sa tâche quotidienne et pénible ; et elle rangera la maison et préparera à manger. Le soir, quand il aura fini, toujours dans son atelier, avec quatre copains, chacun y va de ses litres de rouge,  il sera saoul encore une fois, et retournant chez lui, il manquera pas une occasion d’insulter, d’accuser, de blâmer, de partir dans des soliloques, mal articulés et sans sens ! Finalement, il donnera quelques coups ( si le ciel est clément ), il avait la main facile ! il avait sûrement des comptes à régler. Lesquels ? voilà un mystère que sa tombe enferme à jamais, sa tombe que son enfant n’a plus jamais revue, depuis qu’il l'a enterré ! Les traces de ses fouets sur son corps lui ont indiqué les chemins pour le fuir !

Le silence de ses souvenirs, et dans ses souvenirs, est le même que quand son père est mort dans la chambre voisine à la sienne, et que les femmes sont parties de plus belle de leurs pleurs et cris hystériques, lui, il est resté silencieux mais deux larmes ont coulé, les seules et les dernières !

 

Faysal BADRI

27 – 09 – 2012

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